Mettre un terme à un contrat de travail sans passer par la démission ni par le licenciement, ce n’est pas une idée farfelue. En France, la rupture conventionnelle s’impose désormais comme le compromis accepté, presque institutionnalisé, entre employeur et salarié. Ce mode de rupture à l’amiable du contrat de travail évite un affrontement judiciaire et repose sur la négociation. Mais ce n’est pas une liberté totale : des délais précis et des démarches structurées balisent le chemin. Décryptage des étapes à ne pas négliger.
Qu’est-ce qu’une rupture conventionnelle ?
Avant de s’attarder sur le délai rupture conventionnelle, il s’agit de cerner les contours de ce dispositif.
Rupture conventionnelle : c’est quoi ?
La rupture conventionnelle ouvre la porte à une séparation sans heurts du contrat de travail. Employeur et salarié peuvent l’initier, chacun à son tour. L’employeur évite le couperet du licenciement, le salarié s’affranchit de la démission. Tout repose sur un accord mutuel, l’idée étant claire : la relation professionnelle s’arrête à la date convenue, dans les conditions décidées ensemble.
Pour s’assurer de la conformité de cette rupture, deux exigences principales s’imposent :
- Elle ne concerne que le contrat à durée indéterminée (CDI). Les CDD restent en dehors du dispositif, sauf exceptions très marginales.
- Le consentement doit être libre et éclairé, partagé par les deux parties. Aucun accord ne tient si la pression s’invite à la table des négociations.
Autre limite non négociable : le salarié déclaré inapte par la médecine du travail ou visé par un licenciement économique ne peut faire valoir ce droit. Il en va de même si un plan de sauvegarde de l’emploi ou un accord de rupture collective sont déjà engagés.
Quels sont les avantages de la rupture conventionnelle ?
Face à la démission et au licenciement, la rupture conventionnelle tire son épingle du jeu. Pour l’employeur, c’est l’occasion de préserver l’image de l’entreprise et de privilégier une séparation sans conflit. Ce dispositif adresse aussi un signal positif au salarié, qui quitte l’entreprise sans animosité. La démarche protège l’employeur contre les litiges potentiels : la convention passe par l’inspection du travail, ce qui limite les contestations a posteriori.
Côté salarié, l’intérêt n’est pas mince. Il bénéficie d’une indemnité spécifique : au moins 1/5 du salaire mensuel de référence pour chaque année d’ancienneté. Le licenciement pour faute grave ne donne pas droit à cette compensation. Autre atout : le salarié n’a pas à justifier son départ et peut négocier sa date de sortie, à condition que l’employeur donne son accord lors de l’entretien.
Quels sont les divers délais de rupture conventionnelle ?
Les différentes étapes de la rupture conventionnelle imposent moins de contraintes temporaires que la procédure de licenciement, qui multiplie les convocations et notifications. Ici, la souplesse règne, mais certains délais balisent tout de même le parcours.
D’abord, un délai s’intercale entre la demande de rupture et l’entretien, pour donner le temps à chacun de se préparer. La loi n’impose rien, mais la pratique fixe souvent ce délai à 5 jours entre la convocation et l’entretien.
Au fil du processus, deux délais retiennent particulièrement l’attention :
- La période de rétractation après la signature de la convention ;
- Le temps nécessaire à l’homologation de la rupture conventionnelle.
À noter : contrairement aux autres formes de rupture, aucun préavis n’est imposé.
Le délai de rétractation
Une fois la convention signée, chaque partie dispose de 15 jours calendaires pour revenir sur sa décision. Ce délai inclut tous les jours de la semaine, week-ends et jours fériés compris. Si la période s’achève un jour non travaillé, elle prend fin le jour ouvrable suivant.
Pendant cette période, l’employeur ou le salarié peut annuler la procédure d’un simple courrier, idéalement en recommandé avec accusé de réception pour dater la démarche. Si l’un ou l’autre se rétracte, la convention tombe à l’eau et le contrat de travail poursuit sa route comme si de rien n’était.
Le délai d’homologation
Si aucun des deux n’a usé de son droit de rétractation, la démarche passe par l’étape de l’homologation. Elle s’effectue auprès de la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS) ou de la Direction départementale équivalente (DDETSPP). La demande d’homologation s’envoie le lendemain de la fin du délai de rétractation.
L’administration dispose alors de 15 jours pour donner sa réponse, à compter de la réception du dossier. Sans réaction à l’issue de ce délai, l’homologation est considérée comme acceptée.
Pour les salariés protégés (représentants du personnel, délégués syndicaux…), la procédure diffère. Elle passe alors entre les mains de l’inspecteur du travail et non de la DREETS ou DDETSPP.
Le délai pour bénéficier de l’allocation de chômage après une rupture conventionnelle
L’ouverture des droits à l’assurance chômage s’effectue dès l’application de la rupture conventionnelle, sous réserve de remplir les conditions classiques de l’ARE. Cependant, il existe un délai de carence de 7 jours avant le versement effectif de l’allocation, qui commence à courir à la date de rupture.
Pour clarifier les étapes, voici un récapitulatif des délais à retenir lors d’une rupture conventionnelle :
- Convocation et organisation de l’entretien : 5 jours ;
- Période de rétractation : 15 jours ;
- Homologation : 15 jours ;
- Carence avant ouverture de l’allocation chômage : 7 jours.
Quelles sont les démarches pour une rupture conventionnelle ?
La procédure de rupture conventionnelle s’articule en plusieurs séquences précises, à connaître pour éviter les faux pas.
L’annonce
La demande peut émaner de l’entreprise comme du salarié. Elle doit être formulée par écrit, souvent par lettre recommandée, mais une remise en main propre reste possible. L’autre partie garde toute latitude pour refuser la proposition. Si le salarié dit non, aucune sanction ne peut tomber.
L’entretien préalable
Après réception de la demande, un entretien préalable se tient dans un délai de 5 jours. C’est le moment où se négocient les termes de la séparation : date de départ, montant de l’indemnité, modalités diverses. Plusieurs rencontres peuvent s’avérer nécessaires si les discussions s’étirent.
Les négociations
Chaque partie a la possibilité de se faire accompagner. Le salarié peut choisir un conseiller ou un collègue, l’employeur peut préférer un représentant syndical, un autre employeur ou un salarié de la même branche.
L’établissement de la convention de rupture conventionnelle
Quand l’accord est trouvé, il faut mettre les termes par écrit. La convention reprend les points actés, notamment la date de fin de contrat et le montant de l’indemnité. En pratique, l’employeur peut rédiger le document sur papier libre ou utiliser le formulaire Cerfa rupture conventionnelle. Une fois les signatures apposées, la convention est formalisée.
Le délai de rétractation
Après la signature, la période de rétractation de 15 jours commence. Chacun peut encore faire marche arrière durant ce laps de temps.
L’homologation de la rupture conventionnelle
À l’issue du délai de rétractation, la demande d’homologation peut être envoyée à la DREETS ou à la DDETSPP. Deux options existent : effectuer la démarche en ligne via TéléRC, ou remplir le formulaire Cerfa n°14598.
Au bout de ces étapes, employeur et salarié se séparent sur une base négociée, sans cris ni fracas. La rupture conventionnelle, loin d’être un simple formulaire administratif, marque souvent un tournant dans une carrière, ou dans la gestion d’une entreprise. Reste à chacun de décider, un jour, de quel côté de la table il préfère s’asseoir.


